Marc, l'histoire d'un choc
Marc, l'histoire d'un choc
David-Marc d'HAMONVILLE
Ed. du Cerf, 2019
398 p.
Cette barque dans la tempête ainsi que le titre figurant sur la couverture nous annonce une lecture qui se veut un peu dérangeante.
Sur le mode de la lectio divina, l'auteur Père Abbé de l'abbaye bénédictine d'En-Calcat, nous propose une lecture intégrale de l'Evangile de saint Marc où par petits groupes de versets, il commente ce texte, témoignage d'un disciple appelé Marc et récit de la vie de Jésus.
La lectio divina est une lecture méditée de la Parole de Dieu pratiquée chaque jour par les moines et moniales, mais aussi par des laïcs, vraie nourriture spirituelle qui permet d'être habité par la vie de Jésus et son message. Jésus devenant un véritable ami à nos côtés quotidiennement.
L'auteur nous en fait, dans son avant-propos, une bonne définition :
« Ce qui différencie la lectio de l'étude, c'est la liberté qui est instituée dès le départ : il n'y a pas de plan de voyage, pas de programme, aucune digression n'est prohibée, aucun détour n'est considéré comme une errance, aucun retard n'est sanctionné ; cela prendra tout le temps qu'il faut. Toute la personne est convoquée : pas seulement la tête, mais le corps, la mémoire ; pour approcher de la chair du texte, il faut se dévétir soi-même par moments : le « texte » est bien, comme le dit l'étymologie, un textile, un tissu, à ressentir à même la peau. Lire est une expérience transformante. » (p.11)
« L'histoire d'un choc », c'est d'abord celle de Marc confronté à une rencontre hors normes, celle de Jésus, qui va bouleverser sa vie. Son récit des événements, les mots employés, les omissions, les insistances traduisent sa perplexité mais aussi sa conscience d'une (r)évolution capitale dans sa foi en Dieu et en Jésus et d'un message à faire passer.
En relisant avec nous, pas à pas, cette aventure, l'auteur nous invite à regarder paisiblement mais avec un œil neuf le témoignage de Marc, à sortir peut-être de notre routine d'une lecture de textes qui nous semblent connus. Il pointe du doigt , par exemple, des mots qui peuvent sembler anodins (« Et aussitôt... ») mais traduisent au contraire un fait insolite, caractéristique de la personnalité de Jésus. Voilà le choc, la suite de chocs qui peuvent nous interpeller, nous faire sortir d'une rencontre jusque là mitigée, d'une pratique tiède. Quand on a à côté de soi un ami (donc de confiance) particulièrement « battant », il nous entraîne.
La vie du chrétien est-elle « choquante » ? Est-ce qu'elle interpelle, par ses paroles et par ses actes, ceux qu'il côtoie ? « J'avais faim et tu m'as donné à manger …. j'étais malade et tu m'as visité ... »
Mais ici, pas de méditation ni de transposition à nos vies, l'auteur se « contente », dans son livre d'une première étape indispensable dans la lecture de cet Evangile : d'abord lire et écouter attentivement cette vie de Jésus, vrai homme mais aussi Fils de Dieu. C'est d'ailleurs une grande règle à adopter en toutes situations, comme le conseille aussi saint Benoît : « Ecoute » (Règle de saint Benoît - Prologue) d'abord, regarde, goûte, respire, contemple cette réalité et sa part de mystère. C'est vrai en toutes rencontres et infiniment plus vrai face à Dieu qui s'incarne par amour pour l'homme.
On ne se lasse pas de relire une lettre d'amour. L'Evangile, donc la vie de Jésus, en est une. Si on prend le temps de l'écoute et de l'observation, les mots seront révélateurs. Et si nous n'avons pas toutes les clés pour comprendre et adhérer, laissons-nous aider par ceux qui en ont l'expérience. Donc, une bonne raison pour lire ce livre de David-Marc d'Hamonville.
DG
Extraits
- Etre disciple (Marc 2, 18-19) – p.62-64
« Les scribes des pharisiens viennent d'interpeller les disciples quant au comportement scandaleux de leur maître [Pourquoi Jésus et ses disciples ne respectent-ils pas le jeûne?]...
Jésus répond par un déplacement qui montre le caractère bancal et insuffisant de la question... Au lieu de se focaliser sur les disciples, Jésus renverse le point de vue et oblige à contempler l'étrange maître qu'il est supposé être lui-même... Il emploie trois fois le mot « marié » …
Le premier élément de sa réponse est donc le décentrement qu'il impose à ses disciples : au lieu de se regarder vivre, les disciples doivent regarder et essayer de comprendre leur maître...
Au-delà d'une doctrine à appliquer, la présence au maître, la présence à l'événement que vit le maître, devient la raison d'être d'un disciple authentique. Ainsi la condition de « disciple » n'est pas l'adhésion tout intellectuelle à la doctrine d'un rabbi, mais une véritable suite, un attachement, une présence. »
Mise à jour : Dimanche 10 Septembre 2023, 19:12
Denyse
dans 08- ARCHIVES - Règle de Saint Benoît - Texte et commentaires ch. 1 à 73
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