La Bibliothécaire d'Auschwitz

 La Bibliothécaire d' Auschwitz

 Antonio G. ITURBE

Ed. Flammarion 2020
604 p.

On a pu reprocher ces dernières années la prolifération de romans ou essais de valeurs très inégales sur le thème de la Shoah.

Ce roman de Antonio G.ITURBE est par contre à recommander. Il a d'ailleurs trouvé très rapidement un large public à travers le monde.

C'est un roman mais il s'appuie sur des faits et des personnages authentiques et surtout il est valorisé par une belle qualité d'écriture et l'évocation juste et attachante de ce contexte difficile que furent la vie et la mort au camp d'Auschwitz.

Dita est une adolescente juive qui arrive à ce camp d'extermination avec sa famille où elle va en connaître toutes les épreuves. Elle va faire preuve d'un courage et d'une volonté extraordinaires.
Elle est choisie comme bibliothécaire. Mission peu ordinaire et à haut risque en ce lieu où tout livre est interdit et la détention punie de mort. Sa bibliothèque se résume à quelques pauvres livres de papier qu'en cachette, elle remet en état et prête aux personnes qui le souhaitent. Mais elle a à cœur de faire exister aussi les « livres  vivants »  : romans, poèmes transmis de bouches à oreilles. Ultime sauvegarde qu'aucun nazi ne peut s'approprier.

Les enfants destinés à une mort certaine sont pris en charge, accompagnés ; une classe se met en place, des jeux , des lectures, des célébrations sont organisés.

A l'extrême limite de ses forces, Dita survivra à cet enfer.
Au milieu des souffrances indicibles et des humiliations, l'humanité et la fraternité côtoient la pire inhumanité. C'est aussi la beauté de ce livre. L'auteur nous fait revivre cette période avec beaucoup de délicatesse, de réalisme aussi, pour qu'on n'oublie jamais ce drame où des millions d'innocents ont perdu la vie.

Epilogue intéressant aussi : L'auteur rencontrera par la suite et dans ces dernières années encore , en l'évoquant largement, la véritable Dita Krauz inspiratrice de ce roman, qui restera une femme forte, courageuse, sensible et que tout intéresse , sachant discerner la valeur des choses et des gens.

DG

Extraits

- Ici le livre agit comme un aimant ; ils ne peuvent pas le quitter des yeux et beaucoup n'arrivent pas à résister à la tentation […] de le toucher. [Dita] a peu à peu réalisé que si les livres ont un lien avec les examens, l'étude et les corvées les plus ingrates de la scolarité, ils sont également le signe d'une vie sans barbelés ni peur. Même ceux qui n'ont jamais ouvert un livre autrement qu'en ronchonnant, reconnaissent maintenant, dans cet objet fait de pâte à papier, un allié. Si les nazis interdisent les livres, c'est que les livres sont de leur côté. (p.106)

- Ceux qui croient que les fleurs poussent dans les vases ne connaissent rien à la littérature . La bibliothèque est maintenant son armoire à pharmacie, et elle va donner aux enfants un peu de ce sirop qui lui a permis de retrouver le sourire quand elle croyait l'avoir perdu pour toujours. (p.360)

- Elle serre ce tas de feuilles dans ses bras comme un vieil ami. Avec le plus grand soin, elle s'applique à recoller avec un peu de gomme arabique l'un des dos décousus. Puis elle frotte avec un chiffon propre et de la salive une couverture crottée par la terre de la cachette. Elle soigne les blessures des livres, sans doute pour la dernière fois. Quand elle ne peut rien faire de plus pour les réparer, elle lisse leurs pages pour enlever quelques plis, passant et repassant la main dessus. Bien plus que défroisser les pages, elle est en train de les caresser. (p.479)

Denyse dans 01 - LIVRES - REVUES - Résumés, extraits...2016-2024 - Lu 121 fois -
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