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Règle de saint Benoît ch. 43-44-45-46-47-48-49

REGLE  DE  SAINT BENOÎT - Texte et commentaires

  
                   

La Règle a été conçue par saint Benoît pour des communautés monastiques. Mais que nous soyons religieux ou laïcs dans le monde cette Règle peut être pour nous une aide précieuse pour avancer dans l'esprit de  l'Evangile. Nous en proposons ici un commentaire un peu actualisé.

Les chapîtres précédents sont à chercher dans la rubrique "Archives"

RB 43. Ceux qui arrivent en retard à l’Œuvre de Dieu ou à la table

À l’heure de l’office divin, dès le signal entendu, on laissera là tout ce qu’on a en mains, et on accourra en toute hâte, avec gravité néanmoins, afin de ne pas alimenter la dissipation. Que rien donc ne soit préféré à l’Œuvre de Dieu....

                                          

 Impressionnant chapitre 43 d'une discipline extrême qui peut choquer. Il faut imaginer aussi, à l'époque de saint Benoît des communautés nombreuses où un certain nombre de règles sont nécessaires pour que les différentes activités (office, travail, repas, sommeil...) se vivent dans le calme et soient bien coordonnées. Les négligences ou dissipations de quelques-uns peuvent semer le désordre.
Comme à l'école, il suffit d'un perturbateur pour que toute la classe s'en ressente.

Saint Benoît insiste donc en détail ( voir texte complet) sur toutes les occasions de dysfonctionnement et les pénitences qu'elles impliquent. Il en va de l'harmonie de la communauté dont le but premier est « que rien ne soit préféré à l'Oeuvre de Dieu ».

Il peut nous arriver d'avoir des journées très « dissipées », incohérentes. Une certaine discipline est nécessaire pour que notre vie ne se dilue pas en futilités.

« Nos faiblesses nous offrent la possibilité de faire un pas en avant, de nous convertir...et de travailler efficacement au Règne de Dieu. » (p.472)

«  Autre domaine où nous avons à discipliner notre volonté : la tentation de vouloir trop en faire : pour d'excellents motifs parfois, mais qui ne sont pas entièrement purs de recherche de soi. Le critère : qu'est-ce que Dieu me demande à l'instant présent ? »* (p.473)

RB 44 . Ceux qui ont été excommuniés : comment ils doivent réparer

Celui qui, pour des fautes graves, aura été excommunié de l’oratoire et de la table se tiendra prosterné devant la porte de l’oratoire, à l’heure où l’on y célébrera l’Œuvre de Dieu. Il ne dira rien, se contentant de demeurer étendu, la face contre terre, aux pieds de tous ceux qui sortent de l’oratoire. Et il continuera de faire ainsi, jusqu’à ce que l’Abbé juge qu’il a satisfait. Alors, sur l’ordre de l’Abbé, il viendra se jeter à ses pieds et à ceux de tous les frères, afin qu’ils prient pour lui.

                         

« Excommunié » = retiré de la vie commune. C'est bien là la conséquence d'une faute car souvent elle pénalise d'autres personnes. Nos fautes peuvent déranger l'autre, le blesser, lui nuire. C'est en fait nous-mêmes qui, par notre attitude, nous mettons à part.  Rester « devant la porte de l'oratoire » concrétise cette coupure avec Dieu qu'est la faute.

Nos lenteurs, nos doutes, nos absences retardent l'avancée du Règne de Dieu et donc de tous. Nous devons en prendre conscience. C'est sur cela que saint Benoît insiste. Il ne punit pas, il aide le frère à s'amender et à grandir Ce n'est pas facile , devant tous, de reconnaître ses erreurs. Cela demande de l'humilité. Aimés de Dieu, nous ne sommes pas jugés mais pardonnés pour continuer à avancer en paix.

« Chaque instant peut être pour nous une sorte de recommencement absolu dans notre vie avec Dieu... La joie de Dieu, nous ne la connaissons que là, dans la découverte que nous sommes pardonnés. »* (p.481)

RB 45. Ceux qui se trompent à l’oratoire

Lorsque quelqu’un se trompe dans la récitation d’un psaume, d’un répons, d’une antienne ou d’une lecture, s’il ne s’en humilie pas sur place et devant tout le monde, en donnant satisfaction, il sera soumis à une correction plus sévère ; cela pour n’avoir pas voulu corriger par un acte d’humilité la faute qu’il a commise par sa négligence.
Les enfants, pour ces sortes de fautes, seront frappés de coups de bâton.

Comme dans les chapitres précédents, la Règle de saint Benoît ne tolère pas que le frère ne reconnaisse pas ses erreurs. L'erreur est souvent cause de négligence mais elle est excusable. Ce qui ne l'est pas c'est le manque d'humilité. Reconnaître ses fautes, et particulièrement devant les autres, n'est pas facile mais cela évite peut-être de se l'entendre dire en face ou le murmure des frères.

Se reconnaître pauvre, fragile est pourtant une façon d'avoir conscience de ce que nous sommes et si possible de nous améliorer, d'être davantage conforme à ce que Dieu attend de nous. Pour notre bonheur et celui de l'humanité. Si chacun y mettait un peu du sien, le monde serait plus beau.

«  Pour découvrir l'amour du Christ, pour avoir accès auprès de Dieu, il nous faut perdre la face à nos propres yeux. Se présenter à Dieu comme des pauvres. L'acquisition de cette pauvreté, qui est simplicité, humilité, se fait au jour le jour par l'expérience de nos limites, de nos faiblesses, et en même temps de la miséricorde divine. Réparer courageusement sans dépit, sans amertume ; ne pas se scandaliser des faiblesses des autres. Qu'on sente en tous un désir de mieux faire ; ne pas nous lasser d'avoir toujours à recommencer. Ne pas prendre prétexte de notre médiocrité pour cesser tout effort : cela, c'est de l'orgueil. Mais nous y remettre toujours, non pas, par une intention secrète, pour nous réhabiliter aux yeux des autres et à nos yeux, mais par amour pour Dieu, le regard fixé sur le Sauveur.* (p.483)

                                    
 

RB 46 - Ceux qui font des fautes en autre chose

Lorsque quelqu’un, dans un travail à la cuisine, au cellier, dans un atelier, à la boulangerie, au jardin, dans l’exercice d’un métier, en quelque lieu que ce soit, fait une faute, brise ou perd quelque chose, ou commet un délit quelconque, s’il ne vient pas aussitôt de lui-même en donner satisfaction et s’en accuser devant l’Abbé et la communauté, et qu’on vienne à le connaître par un autre, il sera soumis à une correction plus sévère.

Mais s’il s’agit d’un péché secret de l’âme, il s’en ouvrira seulement à l’Abbé ou aux anciens dotés d’esprit, qui savent guérir leurs propres blessures et celles d’autrui sans les découvrir ni les divulguer.

Les fautes en lien avec la prière et l'oratoire sont considérées comme graves. Mais ne sont pas non plus sans importance celles du quotidien et en particulier celles qu'on dissimule. L'objectif est toujours que celui qui a failli retrouve la paix du cœur.
Quand on reconnaît ses erreurs et qu'on en est pardonné par un frère, une sœur et par Dieu, on repart le cœur plus léger. La faute est derrière nous et sans aucun doute nous rend plus attentifs .

Avec le Christ, nous sommes sur un chemin de perfection qui n'est pas un but en soi mais de trouver le bonheur.

«  Le Christ nous a choisis. Il a choisi des hommes et non des héros. Il ne s'agit donc pas d'acquérir une sainteté idéale à la force du poignet, mais de répondre à la pensée du Christ sur nous ; lui ouvrir notre cœur ; ne pas nous lasser de revenir à Lui, quelques soient les faiblesses et les chutes. Croire qu' Il peut tout en nous »*(p.484)

47. Le signal pour indiquer l’heure de l’Œuvre de Dieu

La charge d’annoncer l’heure de l’Œuvre de Dieu, tant de jour que de nuit, incombera à l’Abbé(avec les moyens de l’époque, il n’était pas facile de compter les heures, d’autant que leur longueur variait d’un jour à l’autre). Il s’en chargera lui-même, ou la confiera à un frère si ponctuel que tout s’accomplisse aux heures régulières.
Ceux qui en auront reçu l’ordre entonneront, à leur rang après l’Abbé, les psaumes et les antiennes. Personne n’aura la présomption de chanter ou de lire s’il ne peut remplir cette fonction de manière à édifier ceux qui l’écoutent, mais le fera avec humilité, gravité et crainte, et après en avoir reçu l’ordre de l’Abbé.

La ponctualité, l'obéissance et l'humilité sont au cœur de ce chapitre où les rendez-vous avec Dieu , le temps de la prière sont prioritaires. Nous sommes généralement ponctuels à nos rendez-vous, à notre travail, à la sortie de l'école. Quelle est donc l'heure quotidienne de notre rendez-vous quotidien avec Dieu ?

On sait très bien que tout laxisme à ce sujet entraîne souvent un délaissement progressif. On ne boit plus à la source et notre foi va se dessécher. Passe-t-on une journée sans manger ?

    
         KIEV        © D.G                                                        © D.G

 «  Chaque fois que sonne l'oeuvre de Dieu, c'est une anticipation de ce moment essentiel où se réalise la Pâque du Seigneur, la rencontre définitive de Dieu... Prenons toujours mieux la mesure de la dimension surnaturelle de notre vie, de l'irruption de l'éternité dans le temps que nous vivons et qui ne prend de sens que par elle.. C'est en ce sens qu'il faut « être à l'Heure » ! * (p.490)

48. Le travail manuel de chaque jour

L’oisiveté est ennemie de l’âme. Les frères doivent donc consacrer certaines heures au travail des mains et d’autres à la lecture des choses divines. C’est pourquoi nous croyons devoir régler comme il suit ce double partage de la journée. (reprenant la tradition biblique, la journée est découpée en douze heures de durée variable, de l'aube au crépuscule – où la première heure correspond de nos jours à six heures du matin).

        
     
      Monastère cistercien de Munkeby (Norvège)
      La fromagerie.

Saint Benoît va développer largement ce sujet du travail manuel des moines qui est, particulièrement pour les cisterciens, un aspect important de leur choix de vie. Il combat absolument l'oisiveté . La vie monastique est très programmée, organisée, rythmée par les sept offices quotidiens ; S'y intercalent les temps de travail indispensables au bon fonctionnement économique du monastère, les temps de prière personnelle, de lectio divina, les temps de repas et de repos. La réunion dans la salle du chapitre est aussi quotidienne où l'abbé commente un chapitre de la Règle et donne des informations diverses. A quoi s'ajoutent ponctuellement des rencontres avec des laïcs, des conférences à entendre ou à donner etc...

Dans la vie active du monde, nous n'avons donc rien à envier aux moines qu'on pourrait croire mener une vie bien tranquille. Mais ce qui en fait la particularité, c'est la recherche d'équilibre entre action et prière. Quant à la relation à Dieu, un moine disait : « Pour moi, il n'y a plus de différence : Dieu est présent sans ma vie dans mes actions comme dans l'Eucharisite, la prière ou le silence. Il est toute ma vie. »

«  Le critère... n'est pas de faire le plus de choses possible ; il est d'être dans la volonté de Dieu, de remplir généreusement le programme de Dieu, qui ne nous demande jamais plus que nous ne pouvons faire. »* (p.493)

 

La suite de chapitre est extrêmement détaillée et rigoureuse dans les consignes , Saint Benoît étant toujours soucieux du respect de chacun. On peut être frappé par ce mode de vie très encadré qui laisse peu de place aux aspirations personnelles mais il est à replacer dans le contexte de l'époque médiévale. Cependant, aujourd'hui encore la fidélité à la Règle dans les monastères reste forte même si quelques adaptations sont nécessaires et bienvenues.

On retiendra ce passage bien connu  :C’est alors qu’ils sont véritablement moines, vivant du travail de leurs mains, comme nos Pères et les Apôtres. Que tout se fasse cependant avec mesure, par égard pour les faibles.

« C'est à la lumière de l'Evangile que prend tout son sens notre travail d'hommes. Il n'est pas un à-côté imposé par les nécessités, en marge d'une activité supérieure que constituerait notre vie de prière, liturgique et personnelle. Il nous insère, comme la prière, à la mesure même de l'authenticité de notre vie de prière, dans l'Oeuvre du Christ créateur et sauveur, en qui se rejoignent et s'unifient la vie du monde et la vie de Dieu. » * (p.499)

RB 49. L’observance du Carême

La vie d’un moine devrait être, en tout temps, conforme à l’observance du Carême. Néanmoins, comme cette perfection est le fait d’un petit nombre, nous recommandons aux frères de vivre en toute pureté ces jours du Carême, et d’effacer en ces saints jours toutes les négligences des autres temps. Nous le ferons dignement, si nous nous préservons de toute sorte de vices, si nous nous appliquons à la prière avec larmes, à la lecture, à la componction du cœur et à l’abstinence.
Donc, en ces jours, ajoutons quelque chose à la tâche ordinaire de notre service : oraisons particulières, abstinence de nourriture et de boisson. Ainsi, chacun offrira de sa propre volonté à
Dieu, dans la joie du Saint-Esprit, quelque chose au-dessus de la mesure qui lui est prescrite, c’est-à-dire qu’il retranchera à son corps sur la nourriture, la boisson, le sommeil, la conversation et la plaisanterie, et qu’il attendra la sainte Pâque avec la joie du désir spirituel.
Néanmoins, chacun soumettra à son Abbé ce qu’il veut offrir, et n’agira qu’avec sa prière et son agrément ; car ce qui se fait sans la permission du père spirituel sera mis au compte de la présomption et de la vaine gloire, et non du mérite. Que tout se fasse donc avec l’assentiment de l’Abbé.

Pour le chrétien, chaque jour est vécu dans l'union à Dieu. Le temps du Carême met encore davantage l'accent sur nos efforts pour nous conformer à l'attente de Dieu. Repérer là où dans notre vie, il y a un peu de négligence pour la surmonter, prier davantage, être plus fraternel etc...

Le but n'est pas le sacrifice mais bien d'être toujours plus à la suite du Christ qui nous mène à Dieu.

Des efforts dans de petites choses nous aideront à en faire dans de plus grandes, à apprendre aussi à renoncer au superflu pour tendre vers l'essentiel. « Dans la joie de l'Esprit-Saint » !

                              

 "Le renoncement allège l'âme, lui rend sa virginité, sa limpidité, sa légèreté surnaturelle. La joie du carême, c'est la joie de donner... Le carême nous fait entrer dans ce désert où peut se nouer le coeur à coeur avec Dieu." * (p.511)

* Cf. Texte et commentaires de la Règle dans  « Quel est l'homme qui désire voir des jours heureux » – P.Denis HUERRE Ed. Saint Léger 2023 Traduit en français par Germain Morin de l’abbaye de Maredsous1944 - Révisé sur la traduction de Philibert Schmitz de la même abbaye , 2023 

Mise à jour : Jeudi 30 Mai 2024, 12:32
Denyse dans 08- ARCHIVES - Règle de Saint Benoît - Texte et commentaires ch.1 à 61 - Lu 280 fois - Version imprimable
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