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 Le Catholicisme a-t-il encore de l'avenir en France ?

Guillaume CUCHET

Ed. du Seuil, sept. 2021
241 p.

                                       

 

Guillaume CUCHET est professeur d'histoire contemporaine à l'université Paris-Est Créteil. Il a notamment publié « Comment notre monde a cessé d'être chrétien. Anatomie d'un effondrement » (Seuil 2018)

«  Le catholicisme a-t-il encore un avenir ? » Question volontairement provocatrice et encore inimaginable, il y a quelques dizaines d'années ! Question hautement sensible pour l'Eglise, pour les catholiques pratiquants mais aussi pour bien des français qui, tout en se déclarant catholiques non-pratiquants, ne font plus baptiser leurs enfants, ne se marient plus à l'église et pour 40% d'entre eux se contentent désormais de funérailles civiles.

Depuis une cinquantaine d'années, les paroisses vivent un processus d'effondrement qui semble irréversible malgré les efforts certains de prêtres et de laïcs qui ne désespèrent pas en un avenir et une renaissance pour l'Eglise, sans trop savoir cependant quels chemins prendre.

Qu'en sera-t-il quand la génération des « babyboomers » de plus de 60 ans encore actifs dans l'Eglise disparaîtra ? Pas de relève sensible dans les paroisses, dans le clergé ni dans les monastères. Dieu va-t-il du même coup disparaître remplacé par les innombrables propositions de la psychologie, du développement personnel ou par les incontestables bienfaits de la nature et du vélo ?

Le livre de Guillaume Cuchet rassemble un grand nombre d'articles sur ce sujet qu'il a déjà traité dans de nombreuses revues généralistes ou spécialisées. Il dresse, sans parti-pris, un historique et un inventaire des origines de l'effondrement du catholicisme en France . Une lecture indispensable pour tous.

Le Concile Vatican II n'a pas provoqué une rupture mais il l'a déclenchée.

L'évolution accélérée des mœurs a confronté à la morale catholique un nombre croissant de personnes qui ont pris alors leurs distances.

L'auteur entame ses réflexions avec « Comment mourir sans croire ? »

L'allongement de la durée de vie, un sujet tabou pour les plus jeunes, la généralisation de la mort à l'hôpital et sa médicalisation croissante sont des facteurs relativement récents qui ont modifié les états d'esprit par rapport à la mort.

Guillaume Cuchet détaille l'évolution de la prise en charge des funérailles à l'église de plus en plus gérée – plutôt bien, dit-il - par des laïcs. La crémation se banalise pour des raisons multiples et souvent pratiques. Malgré cela, l'attachement des familles pour leurs morts encourage l'Eglise à « exploiter » ce moyen d'évangélisation , une façon de « rechristianiser les vivants par les morts ».

Mais l'enterrement d'une personne âgée, le dernier chrétien de la famille, est souvent aussi , même si tout s'est bien passé, symboliquement l'enterrement du christianisme dans cette famille.

L'Eglise pensait que la demande d'enterrements religieux resterait un bastion invincible. Il sera sans doute le dernier à tomber avec la fin de la génération d'après guerre.

Suit un chapitre un peu surprenant sur la « petite métaphysique sociale du jogging » qui lui a plutôt le vent en poupe. On peut voir effectivement un rapport entre sport et religion. Après quoi ou qui courent-ils donc ? Cela concerne souvent les hommes et les femmes d'âge moyen... Symptôme de la « crise du milieu de la vie » ? Certains courent après leur jeunesse d'autres pour fuir leur mort.

Il est de plus en plus souvent question, dans les sciences religieuses contemporaines de la montée des « nones », des « sans-religion » (p .79) avec une grande diversité de profils : athéisme, agnosticisme, indifférence, croyances libres.

Notre histoire religieuse récente a aussi été marquée par l'arrivée de l'islam, deuxième religion du pays (5 à 6 millions de personnes), bien représentée chez les jeunes .

Il y a par ailleurs une demande contemporaine massive de « sagesse » et de « spiritualité » . On connaît la (juste) renommée du médecin-psychologue Christophe André ou de Matthieu Ricard, moine bouddhiste.

Est-ce la déchristianisation qui a engendré ce nouveau type religieux ? Ce qui est sûr, c'est qu'il comble un vide. A qui la faute ?

Tout est intéressant dans ce livre qui pose ensuite les problèmes identitaires et la manière dont l'Eglise s'adapte plus ou moins à ces nouveaux enjeux. Elle a souvent fait taire les sujets (ou les hommes) qui fâchent, elle a toujours été en retard sur son temps par crainte de se déstabiliser ou de s'égarer. Mais aujourd'hui, le temps et les évolutions s'accélèrent, il y a urgence sinon le bateau va couler.

Alors quel avenir pour le catholicisme en France ? Quelles sont ses ressources ?

On peut penser qu'avec ses deux mille ans d'histoire, avec ses hauts et ses bas, l'histoire du catholicisme ne va pas sombrer tel le Titanic. Deviendrons-nous seulement des « catholiques culturels » attachés seulement à leur patrimoine d'une grande richesse ?

Le prochain synode des évêques de France a bien l'intention de prendre ces questions de face. Un vrai dialogue face à des réalités qu'on ne peut et ne doit plus taire devrait ouvrir de nouvelles portes , de nouvelles espérances et réveiller avec des orientations neuves une Eglise qui se meurt .

DG

Denyse dans 01 - LIVRES - REVUES - Résumés, extraits...2016-2024 - Lu 358 fois - Version imprimable
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