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Saint Bernard : Le Sermon des douze étoiles


          Saint BERNARD - LE  SERMON  DES  DOUZE  ETOILES
                           Ecrits sur la Vierge Marie


« Un grand prodige parut dans le ciel : une femme revêtue du soleil, ayant à ses pieds la lune et sur sa tête une couronne de douze étoiles. » (Apocalypse)

Dans une fidélité absolue à la pensée de saint Bernard,  autant que possible le texte d’origine est respecté mais de temps à autre simplifié pour une lecture plus accessible. La richesse des sermons de saint Bernard mérite un accès qui ne soit pas réservé aux initiés.
Rien n’empêche qu’après cette première lecture d’initiation, on retourne au texte original.


                    
                 
1.Eve et Marie
Un homme et une femme, Adam et Eve, par leur désobéissance à Dieu, nous ont porté un grand préjudice. Mais, Dieu merci !,  un homme et une femme, Jésus et Marie ont tout réparé.
Par un don de Dieu inestimable, par sa grâce, et cela sans commune mesure entre la faute des origines et le bien qui est fait.
Considérant la faute, Dieu créateur aurait pu tout détruire. Non, au contraire, améliorant même l’Adam original, Dieu donne vie, par Marie,  à Jésus, nouvel Adam.
Sans doute, le Christ pouvait suffire, et de fait actuellement, tout ce qui suffit à notre salut vient de lui, mais pour nous, il n’était pas bon que l’homme fut seul. Les deux sexes étaient responsables de notre perte et justement il convenait qu’un homme et une femme nous relèvent.
Sans doute, il n’y a pas plus fort et plus puissant médiateur entre Dieu et nous que le Christ, vrai homme.  
Mais en lui, les hommes pouvaient redouter sa majesté et ne plus percevoir son humanité absorbée par tant de divinité sans qu’il ait pour autant changé de nature. Nous chantons tout autant son amour et sa puissance. Dieu est un feu dévorant (Dt 4,24 ; He 12,29). Comme la cire s’écoule au contact de la flamme (Ps 67,1), l’homme ne craint-il pas d’approcher Dieu par risque de mourir ?

2. Médiatrice auprès du médiateur

                   

Cependant, il est évident que Marie, bénie entre toutes les femmes, ne restera pas sans rien faire. Sa place est toute trouvée dans la réconciliation qui nous occupe. Puisque nous craignons d’approcher le Christ qui nous est donné, personne n’est mieux placé que Marie pour être notre médiatrice. Eve fut l’intermédiaire du serpent pour tenter Adam. Séductrice, elle le conduisit à la désobéissance. Marie elle, en donnant la vie à Jésus, fut l’instrument du pardon et apporta la délivrance.

Nous n’avons rien à craindre de Marie tant elle est simple et douce. Relis attentivement les Evangiles où tu rencontres Marie, et si tu y trouves la moindre trace de dureté, alors oui, méfie-toi. Mais au contraire, et cela est certain, tu ne trouveras en ce qui la concerne, que charme, tendresse et douceur. Alors dis merci à Dieu qui te l’a donnée comme médiatrice. Avec elle, tu es en confiance. A tous, sages comme insensés, elle ouvre largement les bras : le prisonnier est racheté, le malade est guéri, le coupable est pardonné et le juste reconnu. Même la Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, trouve en elle la chaleur maternelle. Rien n’échappe à son ardeur (Ps18,7). 


3 - La femme revêtue de soleil

          

Le texte de l’Apocalypse évoque une « femme revêtue de soleil ». Ne crois-tu pas que Marie est cette femme ? Certainement, la vision du prophète vise l’Eglise du temps présent, mais elle me paraît convenir aussi tout à fait à Marie. Comme le soleil se lève indifféremment sur les bons et sur les méchants ainsi Marie ne se préoccupe pas de nos mérites passés mais se montre clémente à l’égard de tous, à tous extrêmement accueillante ; elle prend en pitié enfin les besoins de tous dans une tendresse sans bornes.

Aucune de nos imperfections, de nos fragilités ne peut l’atteindre ; elle nous dépasse tous en perfection, ce qui permet de dire en toute vérité que la lune est sous ses pieds. On ne peut d’ailleurs le mettre en doute puisque Marie est montée au cieux, corps et âme, au-dessus même des anges.

                           

Habituellement la lune, du fait de ses variations désigne une déficience, une altération ou encore la sottise et même quelquefois l’Eglise du temps présent en raison de son éclat parfois fluctuant. « L’insensé change comme la lune, tandis que le sage reste stable comme le soleil. » (Sir 27,12). La clarté de la lune est en effet changeante et incertaine alors que dans le soleil, l’ardeur et la clarté sont constantes.
On a donc raison de représenter Marie enveloppée de soleil. Elle a pénétré dans les profondeurs de la sagesse divine , en est illuminée et même comme immergée . Ce feu qui purifie les lèvres des prophètes a plus qu’effleuré Marie. Il l’a recouverte de toute part. Elle est enveloppée de ce feu splendide qui ne laisse en elle aucune ténèbre, aucune pénombre. Tout en elle est chaleur et ardeur divines.

4 - L’hérésie contre Marie

Toute déraison est si loin sous les pieds de Marie, qu’elle n’est absolument pas à mettre au nombre des femmes insensées. Bien plus, Satan, prince de toute folie qui, semblable à la lune qui décroît, perdit la sagesse du temps de sa splendeur, le voici maintenant sous les pieds de Marie, foulé, broyé et réduit à une lamentable servitude.

                 serpent enluminé

Oui, Marie est bien cette femme jadis promise par Dieu qui devait écraser la tête du serpent qui, malgré mille ruses, ne parvenait pas à l’atteindre. Seule, en effet, elle a écrasé dans sa totalité la malice des hérésies.

Certains niaient qu’elle fut vraiment, dans sa chair, la mère du Christ. D’autres évoquaient un enfant trouvé. D’autres mettaient en doute sa virginité, du moins après la naissance de l’enfant.

D’autres ne voulaient pas entendre parler du nom de Mère de Dieu (Théotokos). Tous ces dresseurs d’embûches, ces trompeurs, ces détracteurs sont écrasés, tandis que tous les peuples proclament Marie bienheureuse. En une ultime manœuvre, le roi Hérode, tel un dragon, et du fait de sa jalousie, chercha à tendre un piège à Marie pour se saisir de son enfant afin de le tuer.

5 - Marie entre le Christ et l’Eglise

                     
                      Abbaye de Cîteaux

Telle la lune, l’Eglise ne tire pas sa splendeur d’elle-même mais la reçoit de Celui qui a dit : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Campée en pleine lumière, Marie est notre médiatrice, « femme revêtue de soleil, avec la lune sous les pieds. » (Ap 12,1).

Attachons-nous aux traces de Marie, mes frères, et jetons-nous à ses pieds en priant ; tenons-là et ne la laissons-pas s’éloigner tant qu’elle ne nous ait bénis ; elle le peut si bien !

Comme Gédéon voulant mettre Dieu à l’épreuve avec une toison de laine posée au sol seule touchée par la rosée alors que le sol reste sec (Livre des Juges 6, 36…), la femme placée entre le soleil et la lune, c’est Marie établie entre le Christ et l’Eglise.
Le miracle de la toison couverte de rosée t’étonnera peut-être moins qu’une femme revêtue de soleil. Grande est l’affinité de cette femme et du soleil mais comment Marie, si frêle, peut-elle résister à un tel feu ?

C’est étonnant bien sûr et tu voudrais comprendre. Cependant, tel Moïse, enlève d’abord les sandales de tes pieds et dépose tes vues trop humaines qui te voilent la réalité divine .

« Je vais voir cet étrange spectacle…, dit Moïse en se voilant la face car il craignait de fixer son regard sur Dieu,… et pourquoi le buisson ne se consume pas. » (Ex 3,3-5). Merveilleuse vision, assurément, qu’un buisson qui brûle sans se consumer ; merveilleux prodige qu’une femme revêtue de soleil, reste intacte ! Cela ne relève évidemment pas de la nature humaine ni des anges. Il faut chercher plus haut encore.

                         
 

« L’Esprit-Saint viendra sur toi , dit l’ange visitant Marie (Lc 1,35),  la puissance du Très-haut te couvrira de son ombre. Dès lors, rien d’étonnant que sous un tel ombrage, une femme puisse supporter un tel vêtement.

6 - Revêtant le soleil, revêtue par lui.

« Une femme revêtue de soleil », dit le texte, pleinement revêtue de lumière comme d'un manteau. Il ne comprend pas, sans doute, l'homme charnel puisque cela est spirituel et lui semble folie. Mais saint Paul ne disait-il pas aussi : « Revêtez-vous du Seigneur, le Christ Jésus » (Romains 13,14). Comme te voici devenue l'amie du Seigneur, ô Dame ! Combien proche, que dis-je, combien intime à cause de tes mérites ; quelle grâce tu as trouvé auprès de Lui ! En toi il demeure, et toi en lui. Tu le revêts de ta chair, et lui, il te revêt de la gloire de sa majesté ; tu revêts le soleil d'une nuée, et toi-même tu es revêtue par le soleil.
                  
                                 
                                  Tapisserie Jean Lurçat

Le prophète Jérémie annonçait du nouveau sur la terre : « Une femme entoure un homme » (Jr 31,22) et Zacharie :  « Voici un homme, son nom est Orient » (Zach 6,12) et cet homme n'est autre que le Christ ! Il vient de faire pareillement du nouveau dans le ciel : une femme paraît, revêtue de soleil. Cette femme a posé une couronne au front du Seigneur, et en retour, elle a mérité d'être couronnée par lui. Contemplez-les !

7 - La couronne de douze étoiles
                       
                      
                        rue du Bac - Paris

Elle avait sur la tête une couronne de douze étoiles, dit l'Apocalypse (Ap 12,1). Il est vraiment digne d'être couronné d'étoiles ce front tellement plus étincelant qu'elles et qui augmente même leur éclat. Pourquoi les étoiles ne seraient-elles pas la couronne de celle que le soleil a vêtue ? Comme aux jours de printemps, les roses en fleur et les lis des vallées se pressaient autour d'elle, raconte le Cantique des cantiques (Cc 3,11). C'est que, en effet, la main gauche de l'époux soutient sa tête et déjà sa droite l'enlace (Cc2,6). Nous, cependant, avec nos tout petits moyens, nous pouvons reconnaître dans ces douze étoiles, les douze privilèges de grâce qui font à Marie une parure unique.

Privilèges du ciel, du corps et du cœur. Ceci multiplié par quatre nous donne les douze étoiles qui brillent au diadème de notre reine.

Eclat particulier rayonnant de la naissance de Marie, de la salutation de l'ange, de la venue sur elle de l'Esprit-Saint, de l'ineffable conception du Fils de Dieu.
Resplendissent aussi d'une beauté éclatante : son premier rang parmi les vierges, sa fécondité, sa maternité, son enfantement. Mais aussi la délicatesse de sa modestie, l'humilité de son dévouement, la magnanimité de sa foi, le martyre de son cœur.
 

8 – Naissance de Marie et salut de l'ange

                         

Que voyons-nous scintiller comme une étoile dans la naissance de Marie? C'est son appartenance au sang des rois, à la race d'Abraham, à la noble souche de David. Cela te paraît peu de chose, mais il y a déjà la sainteté propre à cette lignée et en plus pour Marie, par don de Dieu, elle fut promise du ciel depuis longtemps, prédite aussi par des oracles prophétiques : le rameau du prêtre Aaron fleurissant alors qu'il était sans racines (Nb 17,8), la toison de Gédéon se couvrant de rosée sur une terre desséchée (Juges 6,37), la porte orientale d'Ezéchiel ne s'ouvrant à personne (Ez 44,1). Et plus encore par Isaïe qui annonçait la tige sortant de Jessé (Is 11,1) et une vierge devant enfanter (Is 7,14).
De fait, ils sont grands les signes donnés, parce qu'est grand aussi Celui qui les a donnés. Quels yeux ne seraient pas éblouis par l'aveuglant éclat d'un tel privilège !

Le respect si profond et l'empressement témoigné par l'archange à saluer Marie, comme si déjà il la voyait assise sur un trône royal et exaltée par delà tous les rangs des légions célestes, se prosternant, ou peu s'en faut, devant une femme, alors que jusque là il avait vu sans sourciller des hommes se prosterner devant lui : voilà qui nous prouve la grâce singulière et le mérite de notre Vierge Marie.

9 - Vierge et mère

              
                Nativité - Grèce

C'est d'une splendeur toute pareille que brille, en sa nouveauté, le mode inouï de cette conception : Marie conçoit seule et par la seule opération sanctifiante de l'Esprit-Saint descendu sur elle. Que Marie ait mis au monde le vrai Dieu, Fils de Dieu, que, de ce fait, celui qui est né d'elle soit à la fois Fils de ieu et fils d'homme, Dieu et homme tout ensemble, c'estlà un abîme de lumière et je n'oserais affirmer que devant l'intensité d'un pareil éclat, même l'oeil d'un ange n'en soit aveuglé.

Comment cela se fera-t-il,
demande Marie à l'ange, puisque je garde la virginité ? (Lc1,34). Marie et sa volonté de rester vierge met en évidence la nouveauté d'une telle résolution, transcendant en toute liberté d'esprit la loi mosaïque.C'est là sans doute la raison de son trouble à la parole de l'ange. Elle s'entendait en effet bénie entre toutes les femmes, alors qu'elle souhaitait recevoir à jamais la bénédiction parmi les vierges.

Fécondité et virginité... Ces deux étoiles paraissent plus lumineuses en se renvoyant leurs rayons. Il est déjà grand d'être vierge, mais être vierge et mère est bien plus grand à tous égards.


               

                   Abbaye de Sept-Fons (Allier)

Marie conçut sans plaisir sensuel, sans la fatigue qui accompagne habituellement la grossesse, elle franchit les montagnes pour rendre visite à Elisabeth puis, la naissance étant imminente, elle monta à Bethléem, portant ce léger fardeau, portant Celui par qui elle était portée. Elle mit au monde son fruit nouveau sans connaître la souffrance des accouchées... Que de privilèges ! Ces merveilles, à condition de les méditer assidûment, font naître en nous, l'admiration certes, mais plus encore la vénération, la dévotion, la consolation.
 

10- Les vertus de la Vierge sont à imiter

 Sans doute, ni promesses divines, ni prédictions célestes si nombreuses et si variées n'ont précédé notre naissance : tout cela ne nous a pas été donné, pas plus que l'hommage respectueux de l'archange Gabriel. Moins encore la Vierge peut-elle nous faire partager les deux privilèges qui sont son secret bien à elle. D'elle seule en effet il est dit : Ce qui en elle a pris vie vient de l'Esprit-Saint (Mt 1,20) ; d'elle seule il a été dit : l'Etre saint qui de toi va naître sera appelé Fils de Dieu (Lc 1,31).

A elle seule revient le droit de premier rang. Pourtant quelque chose nous est demandé : si nous manquons de délicate pudeur, d'humilité de cœur, de foi généreuse, de compassion cordiale, la rareté de ces dons sera-t-elle une excuse pour notre négligence ?

Marie fut réservée, l'Evangile nous en fournit la preuve. Elle se tenait à la porte lorsqu'elle cherchait à parler à son fils et ne se prévalut pas de son autorité maternelle pour interrompre le discours ou pour pénétrer dans la salle où son fils parlait (Mt 12,46). Dans les Evangiles, on entend parler de Marie que dans quatre circonstances : à l'ange tout d'abord (Lc 1,34), à Elisabeth lorsqu'elle la visita et où elle se préoccupa surtout d'exalter le Seigneur ; la troisième fois lorsque, avec Joseph, elle cherchait son fils âgé de douze ans (Lc2,48) et aux noces de Cana où le vin manquait (Jn2,3). A ce moment, elle fut réprimandée par son fils, mais douce et humble de cœur, elle ne lui répondit, pas plus qu'elle ne perdit confiance, avertissant les serviteurs de faire ce que Jésus dirait.

                                   
                     Les noces de Cana - Abbaye d'Oriocourt

 11 – Recherche et culte du silence

 Ne lisons-nous pas, selon les évangélistes, que les bergers vinrent aux premières heures et trouvèrent d'abord Marie et Joseph puis l'enfant déposé dans la crèche ? De même, les mages ne trouvèrent pas l'enfant sans Marie ; sa mère. Et quand, au jour de sa purification, Marie présenta, dans le temple du Seigneur le Seigneur du temple, elle entendit Siméon lui dire bien des choses, tant sur son fils que sur elle-même. Or, nous la voyons lente à parler et avide à écouter. En effet, Marie conservait tous ces souvenirs et les repassait dans son cœur (Lc 2,19). Mais dans aucune de ces circonstances, on ne trouve le moindre mot touchant au mystère de l'Incarnation du Seigneur.

          

                   Abbaye de Pontigny


Et puis, que de fois Marie entendit-elle son fils parler aux foules en paraboles, mais encore dans l'intimité, révéler à ses disciples les mystères du royaume de Dieu ; elle le vit opérer des miracles, elle le vit ensuite suspendu à la croix, elle le vit expirer, elle le vit ressusciter et monter au ciel. Or, à tous ces moments-là, fit-elle entendre sa voix ? De plus, nous pouvons lire dans les Actes des Apôtres alors qu'au retour du mont des Oliviers, ils priaient tous ensemble, que Marie n'est nommée que la toute dernière Ah ! Que ces disciples étaient encore charnels – ils n'avaient pas encore reçu l'Esprit-Saint- le jour où ils se disputaient entre eux la première place ! Marie, elle, s'abaissait, non seulement en tout, mais plus que tous, d'autant qu'elle était plus grande que tous.

C'est justice donc  que soit devenue souveraine de tous celle qui se montrait la servante de tous. Je vous en supplie, mes petits enfants, si vous avez un peu d'amour pour Marie, si vous cherchez à lui plaire, tâchez d'imiter ses vertus, imitez sa modestie. Rien du reste ne convient mieux à un homme, rien n'est plus recommandé à un chrétien, rien surtout ne sied tant à un moine.

 12 – Humilité et douceur

La vertu d'humilité, déjà assez évidente chez la Vierge, reçoit de cette douceur même une vive lumière. Humilité et douceur sont sœurs de lait et leur lien de parenté est plus étroit encore :
«  Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur » (Mt 11,29). De même que la superbe est mère de la présomption, ainsi une douceur véritable ne peut découler que d'une humilité authentique. D'ailleurs, il n'y a pas que le silence de Marie à enseigner l'humilité, celle-ci apparaît plus clairement encore dans ses paroles
L'ange lui avait dit : L'être saint qui va naître de toi sera appelé Fils de Dieu  (Lc1,36). Marie n'avait répondu que :  Je suis la servante du Seigneur .

 Marie se rend ensuite auprès d'Elisabeth et tout aussitôt celle-ci reçoit de l'Esprit-Saint révélation de la gloire singulière de la Vierge. Et alors, étonnée de la dignité de sa visiteuse, elle s'écrie : D'où me vient cet honneur que la mère de mon Seigneur vienne à moi ! Et bénissant la voix de celle qui la saluait, elle ajoute : Ta voix n'a pas plutôt frappé mes oreilles, que mon enfant a tressailli de joie dans mon sein. Puis, célébrant la foi de celle qui a cru, elle dit : Heureuse es-tu d'avoir cru car en toi va s'accomplir ce que t'a fait dire le Seigneur (Lc 1, 43-45)

                                  
                                  Vierge d' Orcival

 L'humilité de Marie, qui ne garde rien pour elle seule, veille à tout rapporter à celui qui est l'Auteur des bienfaits loués en elle. Elisabeth magnifiait Marie la mère du Seigneur, Marie elle lui répond : Magnificat ! Mon âme magnifie le Seigneur ! Tu proclames heureuse celle qui a cru, mais la raison de sa foi et de son bonheur, c'est le regard qu'a jeté sur elle la divine tendresse. Toutes les générations me diront bienheureuse, dit Marie, c'est à n'en pas douter parce que Dieu a jeté les yeux sur son humble et toute petite servante.

 13 – Magnanimité dans la foi

Elisabeth ne s'y est pas trompée. C'est une œuvre d'art ineffable de l'Esprit à sa venue, qu'une telle grandeur d'âme se soit unie à une telle humilité dans le sanctuaire du cœur virginal. Grandeur d'âme et humilité sont devenues des étoiles qui se rendent plus brillantes l'une l'autre par leur mutuelle irradiation, la grandeur de l'une n'ayant pas diminué la grandeur de l'autre..
Au contraire, la Vierge, si petite à ses propres yeux, n'en était pas moins grande dans sa foi en la promesse ; elle qui ne se regardait comme rien d'autre qu'une petite servante, n'a jamais eu le moindre doute sur sa vocation à cet incompréhensible mystère, à cet admirable échange, à cet inscrutable secret : elle crut fermement qu'elle allait bientôt devenir la mère de l'Homme-Dieu.

                      

 La grâce divine et l'humilité coopèrent si bien que la grandeur d'âme au lieu de donner place à l'orgueil, fait progresser grandement l'humilité en donnant plus de reconnaissance envers Dieu. Et moins l'on est habitué à présumer de ses forces, même dans les plus petites choses, plus par là même on se fie à la puissance de Dieu dans les grandes.

14 – Le martyre du cœur

Quant au martyre de la Vierge que nous avons appelé la douzième étoile de son diadème, il est décrit tant par la prophétie de Siméon [lors de la Présentation de Jésus au temple] ( il sera un signe de contradiction ) que par le récit de la Passion même du Seigneur (un glaive de douleur te transpercera l'âme).

De fait, quand il eut rendu l'esprit, ce Jésus, ton Jésus – il appartient à tous mais à toi spécialement- ce n'est certes pas son âme à lui qu'atteignit la lance cruelle qui (sans pitié pour ce mort auquel elle ne pouvait plus nuire) ouvrit son côté, mais c'est ton âme à toi qu'il transperça . C'est bien ton âme que la douleur a pénétrée, au point que, avec raison, nous te proclamons plus que martyre, puisqu'en toi la souffrance corporelle fut surpassée par la douleur de ta compassion.

                             

15 – Compassion de Marie

« Femme, voici ton fils », dit Jésus sur la croix en parlant de Jean (Jn19,26). Oh ! Quel échange ! Jean t'est remis à la place de Jésus, le serviteur à la place du seigneur, le disciple à la place du maître, le fils de Zébédée à la place du Fils de Dieu, un simple mortel pour le vrai Dieu ! Comment ton âme si affectueuse n'aurait-elle pas été transpercée en entendant cette parole, alors que d'en évoquer le souvenir suffit à briser nos cœurs de pierre ? Ne vous étonnez pas, frères, que Marie soit proclamée martyre en son âme. Que s'étonne celui qui oublie d'avoir entendu saint Paul mentionner parmi les plus grands crimes le défaut d'amour. (Romains 1,31)

Mais quelqu'un dira peut-être : Ne savait-elle pas d'avance qu'il devait mourir ? - Oui, très certainement ! N'espérait-elle pas le voir ressusciter bientôt ? - Si, en toute confiance. Et malgré cela elle souffrit quand il fut crucifié ? - Assurément et avec violence ! - Mais , frère, d'où te vient cette sagesse ? Jésus pouvait mourir de la mort du corps, Marie est morte avec lui de la mort du cœur. Là, c'est l'oeuvre d'un amour que personne ne surpasse, ici c'est l'effet d'un amour qui, après lui, n'aura jamais son égal.

                       

Prière à la médiatrice

Et maintenant, ô mère de miséricorde, au nom de l'affection de votre très pure âme, la lune qui se tient à vos pieds vous invoque avec les accents de la plus grande dévotion comme une médiatrice entre elle et le Soleil de justice ; que dans votre lumière elle voie sa lumière, et que, par votre intercession, elle mérite la grâce du Soleil qu'elle a véritablement aimé par-dessus tout, et qu'elle a orné, en le revêtant d'une robe de gloire, et en lui mettant sur la tête une couronne de beauté. Vous êtes pleine de grâce, pleine de la rosée du ciel, appuyée sur votre bien-aimé et comblée de délices. Nourrissez aujourd'hui vos pauvres, ô vous notre Dame ; que les petits chiens eux-mêmes mangent des miettes de la table du Maître, et, de votre urne qui déborde, donnez à boire non-seulement au serviteur d'Abraham, mais encore à ses chameaux, Car c'est vous qui êtes, en vérité, la fiancée choisie et préparée pour le Fils du Très-Haut, qui est Dieu et béni par-dessus tout pour les siècles des siècles. AMEN

 


Mise à jour : Mercredi 12 Février 2025, 19:42
Denyse dans 04 - SPIRITUALITE CISTERCIENNE - Saint Bernard de Clairvaux - Lu 187 fois - Version imprimable
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